Extrait du dernier courrier en « lettre ouverte » de Sylvia et Roland DAHAN en date du 27 juillet 2008 :

Objet : Inaccessibilité des établissements scolaires – Le parcours du combattant dans un labyrinthe

Madame, Monsieur,

Suite à ma lettre ouverte du 27 juin 2008, veuillez trouver ci-dessous, la suite donnée pour que mon fils, handicapé moteur, puisse suivre sa scolarité en milieu ordinaire.

La plate-forme « Aide Handicap Ecole » du Ministère de l’éducation nous a contactés et a pris en charge le dossier. Dans un premier temps, elle nous dit qu’aucun travaux ne seraient faits mais qu’une réunion était prévue entre le Recteur de l’Académie de Créteil, l’Inspecteur de l’académie de Seine Saint Denis et le Proviseur du lycée.
J’ai, de mon côté, contacté le Chef des travaux du Conseil Régional d’Ile de France pour avoir des explications. Ce dernier m’a laissé entrevoir la possibilité d’un aménagement partiel ne nécessitant pas de « gros travaux », sous réserve d’accord de la direction du Conseil.
L’inspecteur académique m’a contacté pour savoir si nous serions d’accord que mon fils aille au C.F.A. de Bagnolet le temps que les travaux soient faits.
Entre temps, j’ai remercié le Proviseur du lycée d’avoir fait le nécessaire auprès du Conseil Régional en lui suggérant de ne faire faire que le strict nécessaire pour la rentrée si une salle de cours pouvait être aménagée au rez-de-chaussée.

Finalement :
- Le 8 juillet : Le proviseur du lycée nous informe qu’aucun travaux ne sera fait dans son lycée pour la rentrée 2008, ni pour la rentrée 2009.
- Le 11 juillet : La plate-forme du ministère nous informe qu’une classe sera aménagée au rez-de-chaussée pour que les professeurs du lycée puissent dispenser leur enseignement : pour 4 heures d’enseignement nécessitant un équipement particulier, des professeurs de l’éducation nationale viendront au lycée, et qu’un E.V.S. sera embauché pour aider mon fils en cas de besoin.
- Le 17 juillet : Le chef des travaux du Conseil régional nous informe qu’il a eu l’accord de la direction pour faire faire certains travaux. Il s’est rendu au lycée, en compagnie de la société en charge des travaux, et en présence du Proviseur du lycée le 16 juillet 2008. Pendant l’été, des rampes d’accès et sanitaire handicapé vont être faits, l’accueil au self-service va être revu.
Les largeurs des portes seront faites après la rentrée. Ce dernier point n’est absolument pas gênant car un fauteuil roulant passe sans problème si les portes sont de dimensions standards.
La pose de monte-personnes pour accéder au premier étage sera étudiée plus tard.
- Le 23 juillet : L’inspecteur académique nous confirme ce qui a été dit par la plate-forme du Ministère et par le chef des travaux du Conseil régional.
- Le 25 juillet : Nous recevons l’accord de la MDPH pour la prise en charge du transport.

On répondu à ma lettre ouverte :
- Le Chef de Cabinet du Président de la République (le 18.07.08)
- Le Chef de Cabinet du Ministère de l’Education Nationale (le 10.07.08)
- Le Maire de Joinville le Pont (le 08.07.08)
- Le Proviseur de l’Ecole Boulle (le 09.07.08)
- Le Président de la F.C.P.E (le 02.07.08). La F.C.P.E. a envoyé un courrier au Président du Conseil Régional et au Recteur de l’Académie de Créteil le 22 juillet 2008.
- De nombreux parents dont les encouragements m’ont touchée. On se sent moins seule !

Je remercie les intervenants qui ont bien voulu s’investir pour que mon fils puisse suivre sa scolarité. Je maintiens, cependant, qu’il est absolument anormal de suivre un tel parcours pour obtenir un droit.

Veuillez agréer, Madame, Monsieur, l’expression de mes sentiments distingués.
Sylvia Dahan

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Sylvia et Roland DAHAN                                                            Le 27 juin 2008

                                                                                            

LETTRE OUVERTE ADRESSEE A :

Monsieur Nicolas Sarkozy, Président de la République Française

Monsieur Xavier Darcos , Ministre de l’Education Nationale

Monsieur Xavier Bertrand, Ministre du Travail, des relations sociales et de la solidarité

Madame Valérie Létard Secrétaire d’Etat, Ministère en charge du handicap

M. Jean-Michel Blanquer, Recteur de l’Académie de Créteil et Chancelier des Universités

M. Jean-Paul Huchon, Président du Conseil régional d’Ile de France

Mme Elisabeth GOUREVITCH
13e Vice-Présidente chargée des Lycées et des Politiques Educatives

Conseil régional d’Ile de France

Copies :

-          Aux différents intervenants et personnes contactées.

-          Aux associations de personnes handicapées.

-          Aux associations de parents d’élèves.

-          A la presse écrite et à la presse télévisée

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Monsieur le Président de la République Française,

Messieurs les Ministres,

Madame la Secrétaire d’état,

Monsieur le Président, Madame la Vice-Présidente du Conseil Régional,

Monsieur le Recteur,                                                   

Maman de deux enfants, je me permets de vous adresser ce courrier pour vous faire part des énormes difficultés rencontrées quant à l’orientation de mon fils de seize ans, handicapé moteur (paraplégique depuis deux ans) pour la rentrée 2008.

Ce n’est pourtant pas faute d’avoir anticipé. Depuis le mois de janvier 2008, j’ai rencontré à plusieurs reprises son professeur principal, la principale du collège, le conseillé d’orientation psychologue, le professeur référent MDPH. J’ai également contacté téléphoniquement la personne en charge de l’orientation de la MPDH, le médecin scolaire, la directrice du CIO, l’inspection académique, le conseil régional d’Ile de France, et de nombreux lycées.

Tout le monde s’accorde à dire que "le jeune doit choisir son orientation avant tout", principe sur lequel je suis entièrement d’accord. Seulement voilà ! Un problème de taille se présente :

L’inaccessibilité des établissements scolaires

pour les personnes à mobilité réduite

et le manque cruel d’informations pour tous les intervenants

En résumé, voici le parcours suivi dans le choix de l’orientation de mon fils, entre février et juin 2008. 

On me conseille donc de trouver un lycée accessible ; ce que je m’empresse de faire.

1er choix d’orientation : BAC ou BEP microtechnique. Les lycées contactés sont, pour certains accessibles pour l’enseignement général mais pas pour la partie technique, les machines n’étant pas adaptées au P.M.R. Mon fils aimerait faire une formation en C.F.A. mais on le lui déconseille en indiquant qu’il n’aurait pas le temps de trouver un employeur pour la rentrée.

2ème choix d’orientation : CAP bijouterie. Trois lycées dispensent cette formation en France : un en province accessible et deux à Paris non accessibles.

. Le premier lycée n’a pas le droit (pour des raisons de sécurité et d’évacuation de l’immeuble en cas d’incendie) de faire des travaux d’aménagement à l’entrée de l’immeuble. Dommage, car il y a un ascenseur à l’intérieur de l’immeuble. Pas d’A.V.S. possible d’après la MDPH ; pourtant cette solution aurait permis à mon fils d’entrer et de sortir du bâtiment.

. La proviseure du second lycée m’a fait comprendre que même si mon fils réussissait les tests d’entrée il ne serait pas pris car son lycée n’est pas accessible et n’a pas l’intention de s’en occuper « A moins que vous ne financiez les travaux » m’a-t-elle dit. (résultat des tests d’entrée : Refusé).

3ème choix d'orientation : BAC PRO Artisanat et metiers d'art, option communication graphique ou CAP Dessinateur d’exécution en communication graphique :

. Deux lycées dépendants de l'académie de Créteil offrent cette formation : Un à Bobigny non accessible et un à Montereau Fault Yonne accessible mais à 75 km de notre domicile.

. Un C.F.A., à Bagnolet, dispensant cette formation est accessible. On se rabat donc sur cette formation. Seulement voilà ! En recevant le dossier d’inscription,  je découvre qu’il faut que le jeune soit reconnu "travailleur handicapé". Pour cela il faut faire une demande à la MDPH, remplir un nouveau dossier avec certificat médical et autres documents divers (déjà en leur possession), et qu’il faut en moyenne six mois pour avoir ou non l’accord. Nous sommes au mois de mai, pour septembre 2008 cela s’avère impossible.

4ème choix d'orientation : Seconde technologique  Création Design et Culture Design en vue d’un BAC STI arts appliqués.

Il y a cinq lycées dépendants de l'académie de Créteil, dont 3 pas trop éloignés de notre domicile. 2 sont inaccessibles et le troisième l’est et fait partie du district.

Nous pensons avoir trouvé la sortie du labyrinthe et nous indiquons sur la fiche de liaison :

- Vœux 1 : Le lycée du district avec Seconde technologique  Création Design et Culture Design (options conseillées par le C.O.P.)

- Vœux 2 : Le même lycée avec l’option Informatique des Systèmes de Production (ISP).

La commission d’orientation décide du Vœux 2  (soit un 5ème choix par défaut) en déplorant n’avoir aucun avis médical. En aparté, le médecin scolaire est passé au collège sans prévenir la Principale ni les parents.

Je prends rendez-vous avec la Proviseure du lycée dans lequel mon fils va être affecté afin de préparer au mieux sa rentrée. Elle nous apprend que la décision de la commission d’orientation est irréalisable car la section ISP est inaccessible et les machines inadaptées. Le lycée est accessible seulement pour l’enseignement général et la section création design et culture design. Elle regrette sincèrement que cette orientation soit faite par défaut et s’étonne de me voir bien seule dans toutes ces démarches.

Le même jour, je rencontre la principale du collège, en présence du Conseiller d’Orientation, pour faire le point.

On me conseille d’indiquer les véritables vœux de l’élève sans tenir compte de l’accessibilité. Les lois n’ont qu’à être appliquées tout comme l’a fait la principale du collège lorsque mon fils y est retourné.

Nous indiquons le CAP Dessinateur d’exécution en communication graphique ou le BEP en vue d’un BAC PRO Artisanat et métiers d'art, option communication graphique, au lycée de Bobigny qui n’est pas accessible.

L’inspecteur académique est saisi de ce dossier et il nous assure qu’il n’y a pas de problème. Mon fils ira dans le lycée demandé et le chef d’établissement fera faire les travaux nécessaires durant l’été.  

Le « parcours du combattant » aurait pu s’arrêter là, et bien : non. 

 

Une semaine après, le 27 juin 2008, dans le but de préparer la rentrée (transport, indications médicales et autres) je contacte le lycée pour prendre rendez-vous avec le proviseur. Ce dernier n’a eu aucune confirmation et ne comprend pas pourquoi mon fils est affecté dans son lycée qui n’est inaccessible. Il me dit que les travaux ne seront jamais faits pour la rentrée du fait des procédures à suivre qui sont toujours très longues et que mon fils ne pourra donc pas suivre de cours dans son établissement.

Des travaux d’aménagement pourraient être faits. Par exemple, un élévateur (petit ascenseur qui ne nécessite pas de gros travaux car la machinerie se trouve à l’intérieur de la cabine) coûte entre 9 000 et 15 000 euros, ou encore une plate forme inclinée s’installant dans les escaliers commence à 3 000 € . Ce ne sont pas des sommes extravagantes, d’autant plus que le Conseil régional d’Ile de France m’a assurée qu’il y avait un budget réservé aux lycées pour les travaux d’accessibilités, et que ceux-ci pouvaient se faire durant l’été ; la demande devant venir du Proviseur.

Les travaux dans ce lycée seront-ils faits ?

Permettez-moi d’être pessimiste et de poser la question : Si non, que faire ?

Autre point important et indispensable à la scolarisation d’un élève handicapé :

Le transport du domicile à l’établissement scolaire

Un jeune en fauteuil roulant ne peut pas se déplacer normalement si il n’est pas accompagné (tout comme les non-voyants, les handicapés mentaux, etc…). Les transports en commun ont encore beaucoup à faire pour être accessibles.

En attendant, une prise en charge de transport peut être faite par l’intermédiaire de la MDPH lorsqu’on sait dans quel établissement l’élève va aller. Comme pour toute demande, il faut plusieurs mois pour statuer sur un dossier que je dois constituer. Un des documents doit être rempli par le proviseur du lycée.

Si je n’ai pas la certitude que mon fils puisse être accueilli dans un lycée accessible, je ne peux rien faire. Juillet et Août sont une période estivale et je crains fort de ne pas avoir l’accord pour la rentrée 2008.

Comment faire pour que la prise en charge du transport soit mise en place

dès la rentrée ?

Avec toutes les recherches faites et les démarches effectuées, je constate que les lycées sont plus accessibles en province qu'en Ile de France et je souhaite vous soumettre des idées facilement réalisables. Je constate également que les associations susceptibles d’informer les personnes handicapées moteur et leur famille ne m’ont été d’aucun secours.

J’ai essayé de faire le plus court possible, en résumant les principales démarches engagées, mais je m’aperçois que ma lettre est déjà très longue. Cependant, je ne peux pas faire plus concis car le problème est énorme. Je suis en colère, écoeurée, épuisée ; je m’interroge, je me demande quel avenir notre société offre aux jeunes handicapés ? Je pense à tous les parents d’enfants handicapés qui n’ont pas ou plus le courage d’aller jusqu’au bout, ceux qui sont dans l’ignorance, ceux qui sont perdus dans les méandres de l’administration et les démarches à effectuer. Je me dis qu’il y a, certes, de belles lois, mais qu’elles ne sont pas appliquées ; je me demande même si elles sont connues.

Je ne sais pas ce qu’apportera ce courrier mais j’ai essayé, au travers de ma petite expérience, de faire la synthèse et d’apporter, somme toute, un avis constructif que voici :

-          INFORMATIONS AUX PARENTS sur l’orientation : Devraient être communiquées dès l’entrée en 3ème sans oublier les filières professionnelles.  

Pour les élèves en situation de handicap ou avec des problèmes de santé, une réunion d’information spécifique, dans le courant de l’année, permettrait de donner plus d’informations aux parents. Cette réunion pourrait se tenir au sein de l’inspection académique et/ou de la MDPH et permettrait d’éviter à chaque parent de se démener seul dans son coin. Ce serait un gain de temps pour tous.

-          INFORMATION ET SENSIBILISATION DES CHEFS D’ETABLISSEMENTS sur le handicap.

Certains ne savent même pas où demander le financement des travaux d’accessibilités ! D’autres ne veulent surtout pas s’en occuper « très compliqué, disent-ils ». A contrario, ceux qui y sont sensibles et souhaitent la réussite de tout élève, font leur possible pour communiquer le peu d’informations qu’ils possèdent et semblent dépassés par l’ampleur du problème. Ils n’ont pas l’air de connaître la marche à suivre.

-          COORDINATION entre les différents intervenants (Etablissement scolaire – CIO – MDPH – Médecine scolaire – Parents – Inspection académique). Il semble que chacun travaille individuellement sans aucune concertation et sans trop savoir les difficultés engendrées par un handicap

-          CENTRALISATION DES INFORMATIONS : Il s’avère indispensable de regrouper les informations collectées par les différents intervenants et demandées par les différents acteurs (Référencement des établissements – Préciser les formations impossibles du fait de tel ou tel handicap – Statut à demander en fonction de l’orientation choisie - Démarches à effectuer pour le transport scolaire, etc…).

-          Le CIO – ONISEP : Les établissements sont référencés mais il n’est indiqué nulle part si ils sont accessibles. Pourtant, lors des enquêtes de l’Onisep auprès des lycées, la question est posée. Le fait de préciser l’accessibilité permettrait déjà de mieux s’orienter.

-          La MDPH : Arrêter de faire remplir le même formulaire pour des demandes complémentaires.

. Moins de documents administratifs pour le personnel et pour l’usager, donc une réduction des frais de traitement d’un dossier (gain de temps – économie de papier)

. Mettre en place une procédure simplifiée et rapide pour la prise en charge du transport scolaire de l’élève handicapé. Il reste peu de temps entre l’affectation d’un élève (fin juin) et la rentrée scolaire.

. Faire le lien entre le secteur enfants et le secteur adultes (formation professionnelle). Pourquoi remplir, encore, les mêmes documents alors que le secteur enfants les possèdent déjà ?

Cet organisme semble débordé par l’affluence des dossiers. Pour ce qui est de l’orientation, difficile d’obtenir des informations si on n’insiste pas.  La MDPH est sensée aider les handicapés et leur famille, non ?

-          FORMATION DU PROFESSEUR REFERENT : Il en existe une paraît-il ! Celui rencontré ne sait pas trop quoi faire, ni comment et manque cruellement d’informations. J’ai le triste sentiment qu’il a été mis à ce poste par hasard.

-          PROJET PERSONNALISE DE SCOLARISATION : Il est dans les textes de loi mais pas sur le terrain. Il devrait permettre d’exposer toutes les éventualités pour une meilleure orientation possible. Il devrait être constitué dès que le handicap d’un enfant est connu.

-          MEDECINE SCOLAIRE : Informer les parents de sa visite me paraît indispensable. Je ne comprends pas comment un médecin peut donner un avis sur l’orientation d’un élève sans avoir de documents médicaux.

Si vous m’avez lu jusque là, je vous en remercie très sincèrement. J’espère obtenir des réponses à mes interrogations et j’ose espérer également que des actions concrètes seront menées pour le bien de toute la communauté éducative au service du public et pour la réussite de tous les élèves.

Je vous prie d’agréer, Monsieur le Président de la République Française, Messieurs les Ministres, Madame la Secrétaire d’état,  Monsieur le Président et Madame la Vice-Présidente du Conseil Régional, Monsieur le Recteur,  l’expression de mes sentiments respectueux.

 

                                                                                                          Sylvia Dahan